L’article était aussi mince que les preuves de son innocence, à peine un entre-filet aux mailles aussi denses que celles entre lesquelles il avait su, jusqu’alors se faufiler.
Hélas, tout cela semblait désormais clos.
La rubrique des oiseaux écrasés était sans équivoque : le syndicat du crime organisait une cérémonie en hommage au dodo décédé deux jours auparavant dans un tragique accident de parapente.
Lors d’une manœuvre en losange diagonal, il aurait, selon les témoins , rippé à gauche, obliqué tout droit puis barré à tribord toute sans pouvoir éviter le nuage qui n’aurait jamais dû se trouver dans des eaux aussi chaudes à cette période de l’année.
Les témoins étaient décrits comme confus, un se révélant de surcroit aveugle des deux yeux.
Lors de la reconstitution, qui re-coûta la vie aux volontaires, les vents ascendants furent mis en accusation mais leur avocat, combi d’office, comptait citer à la barre et en tant que témoins assistés les courants descendants ainsi que, suite à déposition de deux nuages noirs présents à l’instant du drame, une brume de matin qui traînaillait encore dans les parages aux alentours de 15h.
Le procès s’annonçait à grands rebondissements mais les gangsters avaient demandé l’ajournement, d’une part car ils étaient allergiques à toute tentative de justice, et de deux car ils réclamaient le droit à la tristesse, le droit à pleurer le plus brave des leurs.
Flanagan filait, lui aussi, un mauvais coton depuis 48 heures, un mauvais coton produit dans une usine du Pakistan sud-oriental et qui boulochait après deux lavages à 40°. Une honte !
Une autre honte que de savoir son plus fidèle adversaire -celui derrière lequel il avait tant couru- disparu, évaporé, parti vers d’autres cieux.
C’en était trop. Il se morfondait dans son bureau, buvant litres et litres de Rooibos, passant sans vergogne de « Pèche-fruits de la passion » à « Pétunia/olives noires ».
Ingrid lui avait bien proposé de l’accompagner à son cours d’étirements mais, même l’idée de voir des corps souples très souples défier les lois des articulations n’arrivait à lui remonter le moral.
Le dodo mort ! En vol qui plus est ! Pour un piaf, quelle mort indigne !
Encore, aurait-il été victime d’un accident de briquet en le rechargeant, le coup classique, un peu d’essence qui tombe sur son ramage puis le geste maladroit, une flamme, une plume qui prend, l’autre qui la suit… Finir en torche volatile, voilà qui eut été une belle fin pour ce dodo. Une mort de jusqu’au-boutiste qui lui allait comme une palme…
En vol ! Il venait de finir un litre de « fleurs rouges/cranberries » quand il commença à tiquer.
En vol !… Un oiseau !… Quelque chose le gênait… Il ré-ouvrit le dossier, compulsa les différents témoignages, ceux des américains, de Gridina bien sûr dont le souvenir santiaguesque lui redonna un peu plus de corps à l’ouvrage… Il en vint à l’affolante déduction que, sous les plumes, le dodo cachait bien des ailes !!!
Et s’il avait des ailes, il pouvait donc voler, seul, sans équipement qui flanche, qui le fourvoie, qui l’enduise d’erreur ! La thèse de l’accident, et par-devers cette thèse, la mort annoncée, l’ensemble du complot battait de l’aile, exactement comme aurait fait le dodo dans telle situation !
Cette cérémonie ressemblait à une mascarade destinée à noyer sous des monceaux de mensonges un dodo toujours vivant et presque aux abois.
Flanagan sortit de son bureau et dit à Ingrid qui tapotait souplement très souplement à la machine :
« Mon petit ! Allez au pressing chercher mon smoking, prenez ces 2,5 € et allez chez Cache-cache vous trouver une robe du soir, nous allons présenter nos hommages à feu-dodo ! »
Feu-dodo !! Un nom qui lui colle à la plume !
Oh la la ! J’aizu la peur de ma vie en imaginant les plumes fracturées du Dodo au sol ! J’ai du aller prendre trois antioxydants avant de m’en remettre. Paske « Do Dodo disparu, enquête foutue ». Proverbe flooibosien bouloché même à basse température.
Dis donque, cache-cache, ça coûte la peau des os.
Vivement l’épisode des funérailles. Pour voir quelles chaussures Ingrid va mettre avec la robe.
J’avoue que je n’ai pas anticipé qu’elle ait à s’habiller grande soirée… Du coup, j’hésite ! Haut talons, bottines ou à plat… Le mystère est, à cette heure, total !
I am the first to start THE conversation. Une fois remise de ma séance de gondolements planétaires dont les gondoles à Venise ne peuvent que laisser le printemps sur la Tamise, je puis zici soulager mes bronches : y aurait-il un doute sur la fausse-vraie-supputée mort du Dodo ? Flanagan-Johnson est LE mec à frime qui sans aspirine peut résoudre cette terrible affaire de nuages foireux à la mode de Caen. M’en vais de ce pas m’en remettre encore un p’tit coup de cette histoire prescrite par ma mutuelle pour soulagement intempestif des problèmes vitaux : trop, c’est pas encore assez !
Je ne sais où se porte la mode de Caen mais je sais que la mode de qu’imper, c’est en Bretagne !
Nouvelles de mon décès légérement érronée – faudrait-il dire dire, s’agissant d’oiseau, héronnée ? je laisse Anne-from-New-Louvain trancher l’affaire.
Sinon non, j’ai des ailes mais j’suis trop paresseux pour les battre en l’air.
Ravi de te savoir moins mort que prévu, cher Dodo ! Lire ça dans le canard m’en avait bouché deux coin à la suite…
Que voilà une histoire de haut vol et nonobstant la perte de quelques plumes par un dodo apparemment bien en vie, j’attends impatiemment le témoignage de cette brume d’un soir qui traînait là ses guenilles à cette heure indue.
Tu utilises le mot « nonobstant »… j’adoooooore !! c’est mon mot favori !!!
La dite brume a été interpellée par la police sur un quai à Tmosfer… (Une ville côtière qui existe vraiment !)
A t’mosfer ? Est-ce qu’elle a une gueule d’à Tmosfer ?
Hi ! J’en ris encore ! Quel délectation ! Pas de savoir le Dodo mort (mais pas maure) (à haute voix c’est bizarre) mais ce rebondissement de haut vol ! En plein vol…ça cloche ! Comme celles qui vont sonner pour les funérailles ! Pour la secrétaire : des escarpins ! Ça passe partout ! 🙂 NOBNOSTANT, chez Cache-Cache, avec 2,5€, elle risque de revenir avec un doigt d’un gant (et encore) !
N’oublions pas -ai-je omis de le mentionner ?- qu’Ingrid jouit d’une souplesse souple très souple, aussi gager qu’elle puisse d’un moufle coupé aux deux bouts faire une robe-fourreau est potentiellement plausible !
Décidément, les dodos n’en finissent pas de mourir!