
Il pleuvait sans discontinuer.
Caillou se remémora.
Une époque merveilleuse : on bâtissait au plus près des cieux, toujours plus haut, vraiment plus grand, et les arcs s’élevaient dans les nefs, surplombant les vitraux par lesquels l’astre du jour, comme celui de la nuit venaient chanter leurs plus clairs rayons.
Perché tout là-haut, caillou passait jours, semaines, années à contempler les faisceaux se balader entre les rangées de sièges, et caresser d’une statue le visage, et illuminer le bassin dans lequel, inlassablement, ces drôles d’humains venaient chercher la pureté.
Le temps passa, cathédrale toujours demandait nourriture et toujours les humains, laborieux convaincus, venaient, revenaient, cassaient, changeaient la pierre qui avait failli.
Aucune miséricorde pour ceux n’étant pas de leur espèce.
Aviez-vous le malheur de vous effriter qu’illico, sans procès, vous étiez tailladé, tapé, fracassé et changé.
C’est lors d’une de ces mutilations qu’elle vint.
Comment vous dire ?
Elle était de Dieu la plus merveilleuse création.
Une cailloute à la robe ciselée, aux coins impeccablement achevés, d’un ocre finement pailleté. Elle s’ajusta parfaitement à l’endroit prévu, nul coup de marteau, nul joint ne furent nécessaires.
Il ne pouvait détourner les yeux, et les vitraux, les rais de lumière, les bancs, les statues, la foule des grenouilles, rien n’attirerait plus son regard qu’elle.
Il aurait tant voulu qu’elle l’aperçoive mais il n’était encore que jeune caillou, timidement caché parmi ses congénères d’arche, manquant par trop d’expérience pour se voir confié un poste en chapiteau, ou un strapontin de bas-relief.
Il aurait tant voulu pouvoir vibrer-femme-pierre.
Si seulement il avait eu le livre à l’époque.
Il se détourna, quitta le rêve, revint à son quotidien de deux siècles et, à ses habitudes tenta de reprendre goût à observer fourmis, statues et lumières.
Une paillette capta son regard.
Cailloute.
Cailloute, histoire de faire d’une pierre deux casse-coups (sic) ?
Parité oblige, je suis allé au-delà de l’asexualité présumée du mineral
Savais-tu, Ornitho, amusante anecdote grammaticale française, que le pluriel de cailloute est « Caillouxxtes » avec un double X rapport aux chromosomes.
Truculent, je trouve !!
Je l’ignoras, pleinement ! un petit « caillouxtes » en plus dans mon vocabulaire.