LTJDNV – scène 25

Juliette avait fait au plus vite, n’avait pas pris le temps de sécher complètement ses cheveux, les avait chignonné « pour qu’ils ne s’ébouriffent pas » ce à quoi Alexandre avait répondu un « Espérons que cela marchera ! »

Ils montaient en voiture comme les cloches de l’église résonnèrent. Juliette compta solennellement les onze coups.

La route menant au marché s’engouffra d’abord sous des futaies bienveillantes laissant glisser entre leurs feuilles de généreux filets de lumière qui tachetèrent le visage de Juliette à travers la vitre; puis l’horizon s’élargit, des champs entourant le bitume, certains jalonnés de sillons tout juste labourés, d’autres plus avancés où les pousses des céréales déjà bien sorties de terre se tortillaient au gré du vent. L’ocre majoritaire accompagnait la sensation d’une hausse des températures brutale. Juliette ouvrit la fenêtre pour laisser vagabonder sa main dans l’air. Elle monta le son de la radio dans le mouvement suivant.

La suite du trajet se fit sans un mot prononcé.

Ils se garèrent sur le bord de la route dès qu’ils virent des voitures stationnées, avant les premières maisons du village.

« C’est très prisé dès les beaux jours. » précisa Alexandre.

La première maison était une ferme totalement rénovée, massive et haute de deux étages en pierre de taille, balcons fleuris de vasques tout justes arrosées dont l’eau dégoulinait au sol où des ruisseaux anarchiques roulaient jusqu’au fossé fraîchement défriché.

La maison suivante était moins charmante, porte anormalement basse, volets quasiment clos pour étouffer tout velléité qu’aurait pu avoir la chaleur de s’engouffrer. Une main apparut à travers le rideau de lamelles de la porte d’entrée, s’arrêta net à leur passage jusqu’à se retirer.

« Les gens du cru n’aiment pas vraiment le remue-ménage créé. Forcément, ce marché attire beaucoup de monde et, ici, les gens aiment leur tranquillité… » Les animaux semblaient moins revêches, un chat allongé sur le rebord d’une fenêtre ne coupa pas son élan de paresse en les voyant.

Ils prirent la deuxième rue à gauche, le chemin était aisément fléché par les allées et venues des habitués chargés de colis et des touristes qui photographiaient tout et rien.

Le marché était posé en plein coeur du village, autour d’une halle rudimentaire ouverte aux quatre vents, les commerçants s’agglomérant sous elle puis tout autour en de petits bosquets de parasols et tables, patchworks de tissus divers.

Des légumes rustiques, posés au sol dans des cageots en plastique se disputaient l’intérêt de badauds à cabas, embouteillant ainsi le passage étroit entre les étals.

Les gens discutaient, riaient, serraient des mains; tapes dans le dos, cris, il leur fallut ralentir le pas, s’excuser, slalomer, des sourires inconnus s’échangèrent.

Miel et confitures s’empilaient sur des tables bancales, Juliette se vit proposer de goûter un morceau de fromage, ce qu’elle accepta dans un sourire avant de reprendre sa marche à la suite du grand gabarit d’Alexandre qui fendait la foule.

Il l’attendit. « Veux-tu boire un jus de fruit frais ? J’ai un amie qui tient un stand juste là » Et il indiqua l’emplacement de la main.

« Euh ?… Oui, d’accord !

– En attendant Elsa et Hugues. Elle a pris un peu de retard. C’est une habitude.

– Ok ! »

Présentations faites, Dominique leur servit dans un gobelet en plastique un mélange où Juliette crut déceler de la carotte qui se révéla être de la betterave mélangée à une orange et du melon.

Alexandre serra des mains, présentant Juliette, « son amie venue de Paris »; certains sourirent simplement, d’autres connotèrent l’arrivée d’un accent pointu, certains s’obligèrent à un « Venue prendre un bol d’air pur ! » et ainsi, ils poursuivirent leur petit tour.

Alexandre prit son portable :

« … Ma chérie ! Oui !… On est juste à côté de la fontaine… »

Juliette remarqua seulement à cet instant la fontaine cachée par des tablées animées.

« Oui… on se rejoint devant chez Hervé… Tu viens, Ju ?

– Oui… »

« Ju », cela faisait longtemps. Ils prirent la marée à contre-sens; celle-ci s’était un peu tarie comme midi approchait. Le même monsieur proposa cette fois-ci un bout de saucisson que Juliette refusa poliment, s’en sortant avec un compliment habilement troussé sur la qualité des produits.

Quelques mètres plus loin, Juliette vit Alexandre s’arrêter, puis Elsa l’embrassant tendrement, Elsa qui vint vers elle et la prit dans les bras tout doucement, avec ces mots qu’elle lui glissa ensuite et en la regardant « Je suis contente qu’on puisse reprendre cette rencontre », des mots qui émurent Juliette au point qu’elle ne put qu’acquiescer, ne trouvant rien à rajouter.

Elsa s’écarta et susurra à son oreille :

« Et voilà Hugues, mon grand frère ! »

Ainsi, au milieu de ce joli carnaval de couleurs et de parfums, Juliette rencontra Hugues.

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7 réflexions sur “LTJDNV – scène 25

  1. En fait j’y gagne à ne venir lire cette histoire que rarement. Ainsi je peux poursuivre un moment, tourner les pages à mon rythme… je poursuis donc 🙂

Ron-ronne-moi un commentaire

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