Cette chienne d’histoire venait de là…
Arrière de l’armurerie. 17h20 selon le panneau extérieur de la pharmacie adjacente mais paraît qu’elle retarde un peu.
L’endroit était désert, comme je l’avais prévu.
Le sergent SisterAnn, posté par mes soins sur le toit d’un des bâtiments alentour, galérait sérieux dans le montage du fusil de sniper que je lui avais confié.
« Comment ça, tu te retrouves avec une gâchette en trop ?… Si elle est là, c’est pour une bonne raison ! Je sais pas, moi, t’as dû rater une étape… Il doit y avoir une biellette pour pouvoir desserrer le truc… Chut ! Chut ! J’entends du bruit ! Débrouille-toi !… Et bouge-toi le c… car j’suis à découvert… »
B… de M… de coup fourré… Le colonel avait bien insisté :
« Flanagan, vous ne pouvez aller là-bas seul ! Cela sent le coup fourré de B… de M… ! Laissez SisterAnn venir en back-up ! »
J’avais accepté, d’autant plus que SisterAnn me devait bien ça car je l’avais assisté il y a une semaine lors d’une descente dans un marché bio pour démanteler un trafic de foetus de panais. Une sombre affaire également.
Je raccrochai, laissant SisterAnn dans son mecano, et scrutai l’angle de mur dont était venu le bruit. Mon oeil de lynx crut voir, au sol, une plume. J’approchai. L’air était aride, âcre, purulent, nauséabond avec des relents d’odeur de pourriture… C’est lundi soir, soir de ramassage des ordures dans le quartier.
C’était bien une plume ! Une plume de 18 cm de long sur 6 de large appartenant à ce Dodo, j’en avais la conviction ! Et mon instinct ne me trompait jamais… A part peut être la fois où… Mais sinon non !
Je procédais par petits pas feutrés dans la pénombre naissante, une méthode que j’avais apprise dans un stage-commando chez les p’tits rats d’l’opéra : pas-chassé/pas-chassé/roooond-de-jambe/écart/on plie, on se relève… Désavantagé par un lampadaire défectueux -salop… de monde anti-nucléaire !- et créant des zones d’ombre d’où pouvait surgir dieu sait quoi, je craignais vraiment le coup fourré de B… de M…
Un papier au sol. Je m’approchai, faisais flexion/accroupi/jeté, saisissais le papier puis d’un roulé/roulé/appui venais me coller contre un mur pour pouvoir lire tranquillement.
SisterAnn dans l’intercom.
« J’ai vu bouger en bas, près du container gris ! Je shoote ?
– SisterAnn, ça, c’est moi.
– Ok donc je shoote pas ?
– … Non ! Vous ne voyez rien d’autre ?
– Non, rien qui ne poudroie ou ne roug… »
Je raccrochai.
Je lus. Décidément, je lisais beaucoup dans cette sombre affaire.
Le dodo était furieux, avait vu SisterAnn, refusait de me rencontrer parce que ce n’était pas ce qu’on avait prévu. Il trouvait un peu abusé la façon dont ça se passait, y voyait une grande marque d’inconfiance, se sentait spolié, sentait le trop-plein d’émotions venir et, quand ça déborde-déborde chez lui, faut qu’il brûle un truc pour lâcher la pression… Mais sinon, il était innocent, il le jurait.
Je relus. Décidément… Je subodorais qu’on pourrait tirer des aveux de ce texte.
J’allai voir le juge Not-fair-but-not-so-far qui l’examina et me dit :
» Flanagan, ne me dérangez plus pour ces broutilles, le dodo est innocent, c’est évident ! D’ailleurs, il le dit ! Si ça, c’est pas une preuve ! J’ai d’autres chiens à fouetter, j’ai toute une troupe de délinquants qui vendaient de la carotte tordue sous le manteau devant les écoles primaires à inculper pour racolage bio ! »
Je repartis dépité. Le système se moque bien des pyromanes quand la gangrène végétarienne pullule.
Mon portable encore. Une sonnerie souple très souple. Ingrid !
Un crachin puis « Monsieur, venez vite ! On me kidnappe ! »
B… de M… !!! Tout cela était un coup fourré !!!
Le coup fourré se poursuivait par là…
Oh mon Dieu ! Mais dans quelle affaire Flanagan est-il donc allé se fourrer ? On sent le danger partout, ça renifle le légume décomposé, et Dodo est innocent. Au fond j’ai bien envie d’y croire, le seul rescapé d’une race disparue ne peut pas être à l’origine de tant d’odieuses machinations, ce juge a l’air d’avoir une tête bien faite.
Ce n’est au moins pas le Dodo qui kidnapperait Ingrid ?
On n’sait plus où donner de la tête, d’ailleurs, faut-il encore en avoir une ?
Oui, je sais ! Je suis un peu existentielle ces derniers temps. 😀
« Un bon légume décomposé est un légume décomposé mort » m’a toujours dit le grand chef cuisinier John Michaëls !!
C’est une transmission de bouche à oreille.
Que dire de celle d’oreille à bouche si ce n’est manger de bonnes paroles.
Une bonne parole décomposée est une parole vivante. 😉
Donc Flanagan a fait de la danse classique? Je suis heureuse de l’apprendre!
Résumons : Ingrid est ligotée d’après le dernier constat, voire enlevée, mais est-ce vraiment un rapt ou une mise en scène pour qu’il s’intéresse à elle ? B… de M… ne parait pas si clean que ses chaussettes le laissent penser. Quant à la plume du Dodo mastard, plume qui vole n’amasse pas mousse, hisse et haut ! SisterAnn shoote plus vite que son ombre, it’s a lonesome cowwoman, et Flanagan Johnson fait la danse des canards, qui en secouant le bas des reins (sans Ingrid), ne fait pas du tout coincoin contrairement à la légende (faut pas croire tout ce qu’on dit quand même !). Et si les panais bio ne l’étaient pas, fœtus ou pas fétus. Bigre, ça se corse (chef lieu Ajaccio, c’est connu, je sais mais je ne m’en lasse pas). Je passe à l’épisode suivant si la page est accessible contrairement à ce tantôt quand elle ne l’était pas ! B… de M… devrait intervenir : que fait la police ?
« Foetus ou paille fétus ! » dirais-je même plus ! J’ignorais, faute d’avoir vérifié, que SisterAnn était à tendance féminine… Ainsi soit-elle !… Et à « Que fait la police , » je répondrais que, dernièrement, elle jouait à la belote dans une auberge à nom d’Oie mais qu’on peut sincèrement optimiser qu’elle viendra nous règler matrak-militari cette B… de M… d’affaire qui nous en-bio-te l’esprit !
Le dodo bientôt victime d’une erreur judiciaire ? Montons un groupe de soutien
Quelqu’un qui mange des
Panais ne peut pas être forcément mauvais ….