Juliette fut réveillée deux minutes avant par un chat revenu de sa fugue sur la pointe des pattes mais pas assez.. La couverture tendue entre ses pieds le trahit en pliant quand il posa les pattes avant.
Elle bougea légèrement et il abandonna toute tentative de discrétion, remontant le long de son corps en roucoulant des trémolos chargés d’émotion.
« Où étais-tu parti ? » murmura-t-elle.
« Miaou… » ou quelque chose dans le style en guise de réponse.
» Dehors, je m’en doute… La chasse fut fructueuse ? »
En tous cas, il ne semblait se plaindre ni de son escapade ni d’être rentré. Elle leva le bras et il vint automatiquement se pelotonner dans l’espace. Elle reposa délicatement la main.
C’est à cet instant que le portable vibra, quelque part sur le parquet, au pied du divan. Juliette fit mine de ne pas entendre. Clairement plus envie de bouger, ils étaient si bien tous les deux, Monsieur en émoi lui griffant avec tendresse l’avant-bras. La faible clarté disparut quelques secondes plus tard et elle s’assoupit quasi instantanément.
Elle se réveilla en sursaut un instant imprécis plus tard. Elle chercha à se reconnecter. Où était-elle ?… Elle reprit conscience : le salon, chez Alexandre… « Alexandre ! » Elle tendit le bras, le chat grommela, sauta du divan puis trottina au loin.
Sa main tâtonnait sur le sol de gauche à droite, elle sentit l’appareil qui pivota sous l’impulsion d’un doigt; elle se traîna de quelques centimètres sur sa gauche pour poser deux puis trois doigts sur lui, le saisir comme un nem et le remorqua vers elle comme elle se tournait sur le dos.
L’écran lui scintilla en plein visage.
Bien évidemment, c’était Alexandre. Et il était 3h38 ! Drôle d’heure pour donner de ses nouvelles. Elle fit glisser un doigt sur l’écran, lut le texte, cliqua sur le côté du portable.
« Des croissants ! » Elle aurait droit à des croissants. Elle reposa le téléphone.
Retour du félin. Il s’assit au pied du divan.
« Viens ! » lui dit-elle en relevant la couverture.
Au contraire, il tourna les talons et partit vers l’escalier, disparut entre les marches et réapparut.
L’invitation était claire. Juliette acquiesça qu’elle serait mieux sous les draps. Encore fallait-il atteindre cet étage si lointain, perdu après les fameuses innombrables marches de 3h40. A 3h40, tout demande plus d’efforts.
Elle se leva, s’emmaillota dans la couverture comme si l’hiver était venu, traversa le salon en traînant des chaussettes jusqu’à l’escalier où Monsieur, fier comme Arpagon d’avoir eu gain de cause, se frottait contre les barreaux de la rampe en bois.
Il l’accompagna à chaque pas, comme pour assurer l’ascension, quitte à la faire tomber d’ailleurs, et ils sortirent victorieux de l’anapurnesque colimaçon à 3h42.
La chambre était la deuxième à droite. Il poussa la porte en éclaireur, elle à sa suite, et comme elle lâcha la couverture par terre, s’allongea et tira les draps pour y engloutir sa fatigue, il sauta à pattes jointes pour filer se cacher dessous.
« On ne joue pas, on dort ! » crut-elle nécessaire de rajouter.
Il ronronna encore quelques minutes, chercha une place qu’il trouva, à gauche de l’oreiller, se coucha et fit comme elle avait dit, il ne joua pas, ils dormirent.
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Manifestement, tu adores les chats. Tu les représentes si bien qu’on les entend ronronner.
Merci !
Un chat qui grommelle, c’est original.
Ils s’aiment vraiment bien ces deux là. Anny Duperey dans son livre « Les chats de hasard » nous dit que c’est le chat qui choisit son maître et non le contraire, je veux bien la croire. J’avais beaucoup aimé lire ce livre là.
Théorie intéressante ! Autant que cet animal !
Après la complicité des deux amoureux dans le chapitre précédent, on mesure la complicité entre le chat et Juliette. Beau chapitre.
Celui-là me tenait à coeur !!
Oui, ça me parait assez évident 🙂